Sélectionner une page

Sei Shonagon est une dame de compagnie de l’impératrice Fujiwara . La lire, c’est instantanément se sentir mieux, plus léger, plus joyeux . C’est plonger dans l’essence des choses, qu’elle décrit avec une immense délicatesse, au travers de textes tout simples .

 » Choses qui rendent heureux « …… On peut y lire aussi « Choses qui égayent le cœur », « Choses qui ont une grâce raffinée », « Choses impatientantes », « Choses qui ne font que passer  » ……

Avec Dame Murasaki Shikibu, elle représente l’autre pilier de la littérature japonaise ancienne.

 » Au printemps , c’est l’aurore que je préfère ….

Tous les Japonais connaissent par cœur l’ouverture de son recueil .

La cime des monts devient peu à peu distincte et s’éclaire faiblement. Des nuages violacés s’allongent en minces traînées. En été, c’est la nuit. J’admire,naturellement, le clair de lune ; mais j’aime aussi l’obscurité où volent en se croisant les lucioles. Même s’il pleut, la nuit d’été me charme.

Traduction André BEAUJARD . » NOTES DE CHEVET « . Collection CONNAISSANCE de L’ORIENT . Gallimard 1968

– P 11

« L’idée d’écrire ces notes …..


me vint dans les circonstances suivantes : Un jour, le frère de l’Impératrice Sadako ayant offert une liasse de papier blanc à sa soeur, celle-ci me dit : « Que peut-on écrire là-dessus ? L’Empereur a déjà fait copier L’Histoire de Chine connue sous le nom de Shiki… » Je lui répondis que je voudrais faire un oreiller de cette jolie liasse de papier blanc. L’Impératrice me répondit : « Eh bien, prenez-le ! »

Je l’utilisai alors à écrire toutes ces choses, toutes ces bagatelles qu’on trouvera, sans doute, bien frivoles : des histoires amusantes, des histoires édifiantes, mes impressions, des poésies, ce que je pense des arbres, des oiseaux, des insectes, et tout cela est, certes moins intéressant que je ne l’imaginais. «  P 11 .

Traduction André BEAUJARD . » NOTES DE CHEVET « . Collection CONNAISSANCE de L’ORIENT . Gallimard 1968

Parler de tout :

Selon son traducteur A. BEAUJARD , Sei Shonagon est capable de parler de tout :

« elle énumère les astres, les phénomènes météorologiques, les époques de l’année, les lieux et les paysages connus, les arbres, les plantes, les oiseaux, les insectes, ….

Sei rassemble aussi les fonctions et les rangs des hommes ; les divinités du bouddhisme et du shintoïsme, et les temples qui leur sont dédiés ; les choses fabriquées (maisons, meubles, vêtements,instruments de musique) et les productions de l’esprit (poésies, chansons, tentes sacrés, prières) ; les qualités physiques, esthétiques et morales, ainsi que les personnes qui possèdent les unes ou les autres et les choses qui éveillent tel ou tel sentiment.

 » Expédier une lettre …c’est magnifique « 

Alors qu’on pense avec anxiété à une personne qui se trouve dans une province éloignée, en se demandant comment elle peut aller, on reçoit d’elle un billet ; à le lire, on éprouve la même impression que si l’on se voyait, tout à coup, en face de son amie. C’est merveilleux.

Remplacer « province éloignée » par « pandémie », et nous touchons instantanément ce merveilleux .

Quand on a expédié une lettre à laquelle on a confié ses pensées, on se sent l’esprit satisfait, même si l’on songe qu’elle pourrait bien ne jamais arriver à destination. Comme j’aurais le cœur triste, et comme je me sentirais oppressée, si les lettres n’existaient pas !
Lorsque, dans une lettre qu’on veut envoyer à quelque personne, on a écrit en détail toutes les choses que l’on avait en tête, c’est déjà une consolation, bien que l’arrivée de la missive puisse être incertaine. Mais à plus forte raison, quand on reçoit une réponse, la joie que l’on goûte semble capable d’allonger la vie ; en vérité, il est sans doute raisonnable de le croire.

Le 1° jour de l’an

Le premier jour de l’année, surtout, me plaît. Le ciel pur se voile d’une merveilleuse brume. Tous les hommes soignent particulièrement leur figure et leur tenue, ils présentent leurs souhaits au Prince et aussi à eux-mêmes. C’est vraiment ravissant.

Mais il existe aussi des chagrins et des peines bien réelles

« Choses qui remplissent d’angoisse :
Regarder les courses de chevaux.
Tordre un cordon de papier, pour attacher ses cheveux.
Avoir des parents ou des amis malades, et les trouver changés. À plus forte raison, quand règne une épidémie, on en a une telle inquiétude qu’on ne pense à rien d’autre.
Ou bien un petit enfant qui ne parle pas encore se met à pleurer, ne boit pas son lait, et crie très longtemps, sans s’arrêter, même quand la nourrice le prend dans ses bras.
Quand une personne que l’on déteste s’approche de vous, on ressent, de même, un trouble indicible. »

Une évidence …..à partager

 » On ne doit jamais manquer de répéter à tout le monde les belles choses qu’on a lues «