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Je ne me souviens pas jusqu’ici, avoir chroniqué un livre – et le film dont il est adapté – où chaque phrase, chaque mot ne renvoient à autant d’intimité.

Chacun y trouvera matière à réfléchir sur soi, sur ses relations avec sa propre mère, sur sa vie, sur sa mort à venir, sur sa définition de la dignité, sur son métier..

Une oeuvre sur la puissance et le courage à la base de tout choix.

L’Annonce

Mme Jospin, sage-femme à la retraite et mère de quatre enfants, dont Lionel Jospin – premier ministre de 1997 à 2002 – leur annonce, à l’occasion de ses 92 ans, son choix de mourir ainsi que la date qu’elle s’est fixée.

 » Afin d’éviter une fin de vie qui échapperait à son libre-arbitre « 

L’adaptation du récit à l’écran

Dix ans après la publication du roman,Pascale Pouzadoux le porte à l’écran, avec deux actrices lumineuses et engagées :

  • Marthe Villalonga dans le rôle de la mère.
  • Sandrine Bonnaire, dans celui de la fille.

Sous l’oeil attentif de l’autrice, Noëlle Châtelet, garante de l’authenticité du passage de l’écrit à l’oral.

L’incontinence urinaire ? Penser et agir à la place de l’autre.

Marthe est hospitalisée, suite à un malaise. Dès le lendemain, habillée de pied en cap, debout au pied du lit, elle soulève sa robe d’un seul coup pour apostropher sa fille :

 » Tu as vu ce qu’ils m’ont fait ! ? « 

Et le spectateur ébahi découvre Marthe, affublée d’un slip-filet.

L’image de la protection contre les fuites urinaires s’est tellement banalisée que nous ne la remettons pas en question. Parce qu‘elle rend tellement service aux soignants, elle ne peut automatiquement, que rendre service à la personne qui la porte.

La terrible gêne et la honte de devenir incontinent passent ainsi à la trappe. Pourtant, si nous voulions bien nous souvenir de notre détresse, lorsque enfants, il a pu nous arriver d’inonder notre lit et de chercher à dormir sur un drap humide et froid.

Ce sera le point de bascule dans l’acceptation du choix de sa mère par sa fille. Toutes deux s’enfuient de l’hôpital, en riant, dans une course-poursuite en fauteuil roulant et vont vivre à l’air libre leur première journée de bonheur complet depuis  » L’Annonce « .

 » Je suis fatiguée « 

Ta fatigue me déchirait…J’aurais voulu redresser ton dos, remplumer tes bras,revigorer tes jambes, te redessiner, t’arracher à la gangue qui défigurait ce corps autrefois si droit, si plein, si alerte, si fondamentalement vivant. P 89

… J’ai compris que si tu ne pouvais accepter la fatigue, c’est aussi parce que tu aimais trop la vie. Il s’agissait là d’une question de cohérence, et non d’orgueil ou de narcissisme, comme on aurait pu le penser. P 90

L’IVV

…le mourir comme un dernier acte de vie, d’autant plus essentiel qu’il est le dernier. Un acte à la hauteur de l’image que nous avons de l’humanité. P 10

…  » Tu sais, ma chérie, m’a dit ma mère peu avant de partir, mon combat à nous a surtout été celui de l’IVG ( Interruption volontaire de grossesse ), le tien, le vôtre, sera celui de l’IVV ( Interruption volontaire de vie, ou de vieillesse ). Et, a-t-elle ajouté, vous le gagnerez. P 127