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J’ai rencontré François CLAPEAU lors de la 1° édition hors confinement des Quais du Polar à Lyon . Pas de cohue,juste des personnes retrouvant avec bonheur le soleil et la possibilité de rencontrer des écrivains tranquillement assis aux différents stands des librairies . Il dédicaçait deux de ses romans policiers campés dans le milieu médical , ce qui est une rareté dans le paysage du roman noir français .

En planque avec sa co-équipière Aurélie

Donat, inspecteur de police, est pris de paralysie au moment même où il s’apprêtait à sortir de leur véhicule pour interpeller un délinquant dangereux . Hospitalisé en urgence en réanimation pour troubles respiratoires aigus, Donat va chercher à la fois à continuer de débrouiller l’enquête commencée, puis de suivre dans les méandres du service , la trace d’un autre criminel.

Flou, flou, flou

L’auteur utilise des phrases courtes et incisives qui maintiennent le suspense de bout en bout . Elles soulignent également les éclairs de lucidité, la brièveté et l’intensité de ses déductions entre 2 passages vaseux induits par les antalgiques puissants.

Encore la nuit . Combien de minutes ont passé ? Combien d’heures ? Donat ne sait même pas s’il s’est endormi après le passage de l’étrange médecin . Il ouvre les yeux,perturbé par une nouvelle ombre . Une autre visite . Il découvre sa meilleure amie, Laure, l’infirmière aux cheveux flamboyants .

……

Donat cligne des yeux à défaut de secouer la tête. Laure est toujours là .

 » Barré  » . P 60 . Ed « J’ai lu  » . Moissons Noires 2018 .

Elle ne porte pas sa tenue blanche habituelle. Elle est en civil . Une jupe rouge plutôt courte qui tranche avec le décor austère… Les pensées de Donat sont traversées par le spectre de l’hallucination ….A mesure qu’il l’observe,des détails alertent ses sens pourtant largement anesthésiés . La poitrine de la jeune femme se soulève trop rapidement,elle semble essoufflée. Son eye-liner coule, elle a pleuré . Il croise enfin son regard : elle est terrorisée .

Id P 61

L’auteur commet 2  » infractions-effractions  » par rapport à notre vision traditionnelle du milieu hospitalier :

  • une personne hospitalisée peut avoir une vie intérieure très proche de sa vie habituelle, professionnelle comme personnelle
  • un hôpital et à fortiori un service de réanimation tournés tout entiers vers la protection et l’amélioration de la santé des personnes , peut abriter des criminels

Le temps ne s’arrête pas aux portes du service de réanimation

Si la perception des heures est altérée par les drogues et le décours de la maladie , Donat réfléchit, analyse, suggère et propose des pistes à sa co-équipière qui vient régulièrement lui rendre visite .

Je n’avais jamais lu d’ouvrage où un patient, paralysé et ne communiquant que par l’intermédiaire d’une petite ardoise blanche,continue d’avoir sa propre personnalité , ses émotions particulières . Classiquement,les protocoles de soins cherchent à rétablir la personne hospitalisée dans sa dignité, mais le patient n’existe que pendant les brefs moments d’échange avec les soignants et sa famille ; comme si le reste du temps, il était dépourvu de sensibilité, d’idées et de pensées .

La puce à l’oreille

François CLAPEAU , journaliste spécialisé dans le domaine de la santé , nous alerte : un patient, paralysé ou non, n’est pas un corps mort , avec toutes les nuances inhérentes à la  » vraie vie  » .